Toute histoire, ou presque, se compose d’une tige dominante : l’intrigue principale, celle qui guide la croissance, porte la cohérence et dessine la promesse du livre. Autour, surgissent d’autres pousses : les intrigues secondaires. Leur fonction n’est jamais purement décorative. Si elles sont bien maîtrisées, elles épaississent le tissu narratif – donnent de la densité aux personnages, révèlent des enjeux latents, enrichissent le rythme.
La critique et éditrice Francine Prose rappelle : « Les intrigues secondaires sont le miroir où se réfléchit la trame principale. » (Francine Prose, *Reading Like a Writer*, 2006). La structure même du roman en dépend. Selon un rapport du Centre national du livre (2022), près de 68 % des lauréats de prix littéraires citent le « jeu d’équilibre des sous-intrigues » comme critère de leur succès narratif.
Confronter l’arbre principal à ses rameaux : ce principe botanique vaut en écriture. Un bon roman sait accorder espace et lumière à chaque requête narrative, tout en s’assurant que la plante centrale n’est jamais éclipsée. Plusieurs méthodes permettent de veiller à cet équilibre – à la fois sur le plan macro (plan général) et micro (enchaînement des scènes).
Exemple : Anna Karénine de Tolstoï tresse l’histoire centrale d’Anna avec celle de Lévine, qui joue un rôle de contrepoint et d’éclaircissement thématique. Balzac, dans Le Père Goriot, superpose la destinée de Rastignac à celle de Vautrin ; la tension s’accroît à chaque croisement, jamais gratuite, toujours reliée au cœur du récit.
Abondance ne fait pas toujours qualité. Souvent, la bêta-lecture révèle les boulets : sous-intrigues orphelines, personnages secondaires qui n’ont de fonction qu’anecdotique, digressions qui étouffent l’effet recherché. La coupe, dans ce cas, est un geste de jardinier, pas de bûcheron.
Les éditeurs l’attestent : selon une enquête des éditions du Rouergue (2023), 56 % des manuscrits en réécriture avancée perdent au moins une intrigue secondaire lors de leur travail de structure – pour plus de lisibilité et d’impact.
Des intrigues secondaires réussies épaississent la voix d’un texte en lui donnant du relief, mais ne parasitent jamais la sève du projet. Pour cela, chaque sous-intrigue doit répondre, tôt ou tard, à la question cruciale : que dit-elle du thème majeur du roman ?
James Baldwin avançait : « Une intrigue secondaire ne doit jamais exister simplement pour elle-même ; elle doit résonner, produire une modulation, dire le roman d’une autre façon » (Notes of a Native Son, 1955).
Le danger principal, lorsque la structure narrative devient touffue, tient à la dispersion et à l’essoufflement du lecteur. Les études de l’American Reading Habits Survey, 2021 montrent que 72 % des abandons de lectures de romans complexes sont attribuables à « une multiplication de fils qui n’aboutissent pas ».
La littérature d’aujourd’hui se nourrit de pluralité – des histoires d’exil, des romans choraux, des autofictions éclatées. Choyer ses intrigues secondaires, cela revient à reconnaître la richesse des voix périphériques. Mais sans perdre de vue la ligne, le souffle initial, la cohésion qui fait roman. Chaque auteur ou autrice explore ses propres jardins secrets ; la structure narrative reste un geste d’artisanat, mais nulle plante ne s’épanouit longtemps si la sève se disperse dès la racine. Au comité de lecture, c’est cet équilibre – ni surcroissance, ni pauvreté – que l’on guette.
Travailler cette balance demande écoute, outils, et parfois, le courage de couper une branche déjà fleurie pour assurer la vigueur du tout. Ici, sur Graines d’Auteurs, c’est ce geste-là que nous affinons ensemble, cultivant la promesse d’un livre où chaque voix trouve sa juste place, sans s’étouffer ni s’effacer sous la masse. Là réside la force tranquille des récits qui marquent.
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